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Textes d'auteurs (2010)

 

De la personne à l'Impersonnel   Qu'est-ce que l'individu ?
3e Millénaire, Automne 2011, No 101

NB: De courts extraits d'articles de la revue, parfois légèrement adaptés.

Qui suis-je ?
Gangaji

- Si vous pensez être limité à un corps, la préservation de ce corps va devenir votre priorité absolue, de façon consciente ou inconsciente.
  De toute évidence, tout besoin de préserver et de garder le corps en bonne santé pousse à développer des stratégies de protection et de défense... Tant que la préservation du corps reste prioritaire, nous percevons l'univers comme étant dangereux et nous vivons sur la défensive. Les mécanismes de défense.. créent une souffrance énorme et conduisent à la guerre. La guerre entre parents, tribus, nations trouve ses racines dans les identifications très restreintes que nous nous faisons de : nous sommes quelqu'un de particulier, profondément séparé des autres.
- Vous êtes davantage qu'un corps : vous êtes ce qui anime le corps.
- On s'aperçoit que l'ego n'est finalement qu'une pensée... La conviction de l'ego en "Je suis ce corps" est en réalité le seul obstacle à la reconnaissance de qui vous êtes. Cette croyance doit être entretenue sans relâche, par une activité mentale continue qui maintient l'image de celui ou celle que vous pensez être. Lorsque vous arrêtez cette activité mentale en tournant votre attention vers l'intérieur, vers le "Je" primordial, vous découvrez une conscience pure, sans limite, naturellement libre de toute pensée et de tout besoin de sécurité. Vous comprenez alors que l'ego est une illusion...
- Le "Je" individuel n'est qu'un rêve. Quand vous sortez d'un rêve, qu'il soit rose ou noir, vous voyez que ce n'étais qu'un rêve. Tous les rêves et les illusions ne posent problème que s'ils sont pris pour la réalité... L'illusion représente un énorme pouvoir tant qu'elle n'est pas remise en question. Le vrai questionnement sert à distinguer ce qui est réel de ce qui est illusoire, ce qui est éternel de ce qui est éphémère.
- Qui suis je ? Voilà la question la plus importante que vous puissiez vous poser.
- On peut aisément constater que la pensée « Je suis quelqu'un » donne naissance à toutes sortes de stratégies : être meilleur.. avoir plus de plaisir et plus de réussites...
- Qui êtes-vous, vraiment ? Comment savez-vous que vous êtes cela ? Est-ce vrai ? Vraiment ? ... Ce qui peut être oublié n'est pas assez réel pour apporter de véritable certitude.
- Dès que vous acceptez de ne plus vous leurrer et de découvrir directement et pleinement que vous êtes la conscience elle-même, et non ses définitions impermanentes (parent, amoureux, abandonné, éveillé, vaincu...). la recherche de vous-même dans la pensée prend fin.
  En suivant la question Qui ? en toute innocence et pureté, jusqu'à sa source, une réalisation immense et étonnante se produit : il n'y a là aucune entité ! Il n'y a que la reconnaissance de vous-même, indéfinissable et sans limite, inséparable de quoi que ce soit.
  Vous êtes libre. Vous êtes complet. Vous êtes infini... Vous êtes la conscience...
  Laissez mourir toute définition de vous-même
à l'instant. Laissez-les partir et voyez ce qui reste. Voyez ce qui n'est jamais né et qui ne meurt pas. Ressentez le soulagement qu'il y a à déposer le fardeau d'avoir à se définir... Vivez la joie présente. Reposez-vous dans la paix infinie de votre véritable nature, avant qu'une quelconque pensée à propos de Je n'apparaisse.

Pourquoi l'impersonnel « n'existe » pas
Jeff Foster

- Vous continuez à aller aux réunions des enseignants, à lire leurs livres, dans l'espoir vain que l'éveil arrivera un jour... même s'il n'existe ni « vous » ni « un jour »...
- La véritable liberté est en réalité au coeur de votre histoire personnelle, au coeur du désordre de l'existence humaine. C'est là que brille la grâce.
- Aucune philosophie ou système de croyances aussi raffiné, aussi radical et sans compromis soit-il, ne peut vous protéger de la vie elle-même. La vie est l'autorité, et tous les systèmes de croyances s'effondrent face à elle.
- La vie telle qu'elle est, est complètemet au-dela de toute compréhension tout comme la vague ne comprendra jamais l'océan parce qu'elle EST l'océan...
- Seul un ego affirmera être libre de l'ego.
- Le monde est un parfait miroir de vous-même.
- Personne n'a de réponses... Aucune vague de l'océan ne peut transcender l'océan - car elles sont seulement l'expression de l'océan. Une vague qui prétend avoir transcendé l'océan ou être allé au-delà de l'océan, n'est toujours qu'une vague qui fait certaines déclarations... La vague ne peut aller au-delà d'elle-même. Toutes les vagues sont égales en essence : elle sont eau.
- Vous ne trouverez nulle part l'impersonnel si ce n'est au coeur du personnel - un paradoxe absolu, pourtant aussi simple que la respiration.
- Vous devez être très prudent lorsque vous parlez de non-dualité ! Le chercheur veut être nourri. Dès qu'il s'est emparé d'un concept, il l'utilisera pour approfondir sa recherche... Par exemple s'il n'y a pas de libre arbitre, pas de choix, si les autres n'existent pas et que personne ne souffre, je peux alors faire tout ce que je veux, je peux sortir et tuer quelqu'un, cela est sans importance, parce que tout est Un et qu'il n'y a pas de choix. Voilà ce qui se passe lorsque la non-dualité devient un autre forme de séparation.
- Du point de vue de l'océan, il n'y a ni temps, ni espace, rien à faire et nulle part où aller, car l'océan est au-delà de toutes ces divisions. Cependant, au même instant, la vérité ultime s'exprime en tant qu'espace et temps, en tant qu'apparence des vagues, en tant qu'apparence de quelqu'un dans un monde où nous vivons, nous rencontrons... Vous n'existez pas et pourtant vous êtes, c'est pourquoi je peux vous aimer... Je danse et joue en tant que vague, me connaissant à tout moment comme l'océan, sans aucune contradiction. Cela n'apparaît comme un paradoxe que pour le mental qui cherche...
- Ainsi, ce qui est vu actuellement est que la non-dualité n'est pas le rejet de la dualité, mais sa célébration... Quelqu'un et personne sont en réalité un, ils n'ont jamais été deux.
- Personne ne vit dans la vérité ultime. Nous ne pouvons pas vivre dans l'ultime. Nous vivons ici, dans ce monde du temps, de l'espace et des choses apparentes... Qui peut nier le nom et la forme ? Qui peut nier l'histoire ? Qui rejette le personnel ou voudrait le rejeter ?
- La véritable liberté n'est pas de fuir le personnel pour l'impersonnel - elle est à trouver au coeur même de l'expérience humaine la plus intime. Quel soulagement d'être de nouveau un être humain qui vit et respire, de permettre à la vie de s'exprimer à travers ce nom et cette forme humaine, à travers cette magnifique expérience personnelle et de savoir que ce n'est rien d'autre que l'impersonnel qui joue, danse et se réjouit à chaque instant.
  Toutes les traditions sont limitées et le chant de la vie ne peut être contenu. Le fondamentalisme ne peut pas tenir, l'amour détruira tout au final.
  Alors raconte ton histoire et laisse briller l'impersonnel.

Le souffle et la flûte
Thierry Vissac

- Le regard conscient (plutôt que les spéculations intellectuelles et les constructions mentales) permet de reconnaître que nous sommes quotidiennement animés par des forces, des passions, des instincts, des désirs qui font de nous des personnes en quête de survie, de bonheur et de bien-être.
  Une fois ce constat honnête établi, il est possible de considérer la possibilité de ne pas être "que cela".
- L'être humain est-il condamné à n'exprimer que des besoins personnels ? Est-il réduit à cette quête individualiste, voire égocentrique, de l'existence, qui se manifeste fortement dans les pratiques du développement personnel aujourd'hui ? Est-il autre chose, dans son essence ou sa nature profonde, qu'une capsule de chair habitée par la peur et la division ?
  Pour faire cette découverte, il vaut mieux éviter de recourir uniquement à la cogitation car l'exploration de notre nature profonde ne se fait pas dans la tête, ni dans les livres. Il est nécessaire d'effectuer une descente en soi, les yeux grands ouverts et le mental en veilleuse.
  Lorsque nous sommes attentifs à notre vie intérieure, c'est-à-dire que nous ne sommes pas coupés de notre ressenti le plus intime, pas enfermés dans la pensée discursive ou le bavardage mental, même le plus inspiré, nous réalisons assez facilement que nous sommes le lieu d'un foisonnement de vie. Ça bouge en permanence au-dedans, et nous sommes conditionnés à gérer tout ça de peur que ça déborde, d'être submergé, de perdre le contrôle.
  Cette gestion est équivalente à une répression. Nous fermons les tiroirs, plaçons des couvercles et fermons les portes sur beaucoup de choses en nous pour des raisons spirituelles. Pourtant, s'il existe une dimension impersonnelle à l'être, ce n'est pas en fuyant ce qui émerge en soi que nous allons le découvrir, même si c'est pour fuir vers des paradis artificiels ou des constructions mentales lumineuses et aseptisées.
  Autrement dit, nous évitons le lieu même de la découverte et préférons par peur et par conditionnement collectif nous évader dans des pensées, des concepts et des projections que nous finissons par prendre pour la vie.
  Chaque fois que l'être humain a découvert en lui-même la possibilité de l'amour, du don gratuit, de la communion avec l'environnement ou avec les autres... ces révélations sont "ressenties" et non "pensées", elles émergent de son centre et non de sa tête.
- Je suggère à tous les chercheurs d'absolu de se reconcilier avec le relatif... Je préconise de permettre au souffle de circuler librement et en conscience, par l'accompagnement sans crispation des multiples expressions de l'intelligence de la vie en soi, même les plus inconfortables et, par cet acte d'amour fondamental (accueillir ce qui est en soi), de laisser s'exprimer ce qui est tenu comprimé par nos habitudes de contrôle et de fuite, y compris celles issues des concepts et projets spirituels.
  Le souffle doit passer par la flûte pour jouer une mélodie sans laquelle il n'est pas "vécu" comme souffle créatif. L'Intelligence de la vie n'appartient pas plus à la personne que le souffle à la flûte, mais elle l'anime d'une façon qui mérite le respect des deux réalités.

Je suis, nous sommes, personnellement, impersonnels en tout lieu et tout temps en même temps
David Ciussi

- Chaque instant porte en lui l'enchantement et la joe illimitée du miracle d'exister
- L'humain identifié à son personnage est hypnotisé par ses difficultés et ses fautes... Il souffre dans ses sentiments, craint ses pensées et doute de ses actions. Il nourrit la peur de l'inconnu, du vide et des autres. Son amour pour la vie se réduit à posséder, dominer et contrôler. Sa capacité à vivre l'instant présent est voilée par ses projections, ses croyances...

Une brève introduction à la non-dualité
Richard Sykvester

- « C'est ceci et c'est suffisant » résument de façon simple la libération... ceci est tout ce qui est, et également suffisant.
  Lorsque le voile de la séparation qui nous fait considérer la vie quotidienne comme acquise et nous fait rechercher toujours plus d'excitation, n'es plus là, l'ordinaire se transforme en ce jeu merveilleux de la conscience... Lorsque la vie de tous les jours est vue comme un miracle, il n'est plus besoin de rechercher quoi que ce soit pour la pimenter... une tendance à une détente profonde prend place, ainsi qu'une joissance des choses simples comme le bruissement des feuilles dans le vent, la vision de l'eau qui ondule à la surface d'un lac ou l'odeur d'un café fraîchement moulu.
- Rechercher apporte la garantie de ne pas trouver, car cela nous éloigne de la présence. Tant que nous recherchons le secret de l'illumination là-bas, au loin et dans le futur, nous ne pouvons pas remarquer que c'est déjà ic, maintenant.
  Si ce qui est dit ici est vraiment entendu, ce sera la fin de la recherche spirituelle et « votre tête sera dans la gueule du tigre ». Il n'y aura plus d'échappatoire.
- Notre recherche est sans espoir puisque nous n'avons jamais perdu le paradis. Le paradis que nous essayons de regagner est toujours avec nous, mais il est caché par la présence du soi séparé. Nous n'avons pas besoin de trouver le paradis, nous avons besoin de perdre notre sens de la séparation pour voir que tout est déjà là. Mais le soi séparé, le faux soi, est incapable de voir la réalité. L'oeil ne peut se voir... Le soi ne peut se trouver...
  Toutefois, le faux soi non causé et non sollicité peut disparaître et dans cette mort de la personne, la complétude, l'untié, la non-dualité peuvent être vues de nouveau.
- Dans la vision de la non-dualité, il est vu qu'il n'y a personne ayant une autonomie et une responsabilité pour faire des choix dans ce qui s'appellerait « sa vie ». Il est également vu que tout surgit du rien, et qu'au coeur de cette manifestation merveilleuse il y a le vide... il n'y a personne qui fasse un choix et tout surgit du vide... le libre arbitre est une illusion.
- Le physique ne donne pas naissance à la conscience. La conscience donne naissance au physique.
- La nature ultime du vide est l'amour inconditionnel...
- Lorsque la libération est vue, la vie devient moins compliquée. Toutes les histoires, qui ont alimenté notre vie, s'évanouissent et nous restons avec la simplicité de ceci. Dans cette simplicité, les petites choses ordinaires de la vie peuvent enfin être réellement appréciées.

  Si je devais donner un seul conseil, je dirais de se détendre et de prendre plaisir dans les choses simples que vous aimez faire, car tant que la vie ordinaire n'est pas appréciée, le miracle de "ceci" n'est pas vu.
  Dans la tradition Zen, il est dit : « Avant la libération : couper le bois et porter l'eau. Après la libération : couper le bois et porter l'eau. » ou boire du thé et manger du gâteau, avant et après.... être endormi et être éveillé, tout cela est identique.
- À la libération il est vu que l'individu que nous pensions être n'est simplement qu'une apparence. Dans notre coeur et au coeur de chaque chose se trouve l'Être indifférencié à partir duquel toutes les différences apparaissent. Il n'y a pas de soi, pas d'individu, pas de personne.
- Lorsqu'il est vu qu'il n'y a pas de séparation, le sentiment de vulnérabilité et de peur qui est attaché à l'individu s'efface et ce qui reste c'est l'émerveillement de la vie qui se présente... Il y a une sensation de facilité et d'aisance devant tout ce qui se présentre, et il n'y a plus l'envie de "saisir" ce qui pourrait advenir.
- Des enseignants suggèrent qu'il existe une personne qui peut découvrir qu'il n'y a personne. L'absurdité de cette idée est souvent cachée par un système de pensées à la fois extrêmement complexe et subtil.
  Des enseignements avancent l'idée séductrice que la libération peut être réalisée au travers d'un chemin spirituel évolutif... une histoire dénuée de sens... tout ce que vous pouvez en tirer, c'est d'être plus à l'aise dans sa prison.
  Rien ne fera sortir la personne de sa prison car la personne est la prison. Lorsque la personne disparaît, il est vu qu'il n'y avait jamais eu de prison.
  Il est vu que "je" et "vous" sont la lumière dans laquelle tout surgit.

La conscience de la personne et a-conscience d'être
Quel pont possible ?
Serge Pastor
- Un individu émet parfois plus d'un millier de formes-pensées par jour ! Dans ce défilé d'images, de sensations, d'émotions, de films intérieurs, produits sans relâche et de façon stéréotypée et névrotique, le penseur est comme un navire emporté par les flots, voguant de-ci delà, sans destination précise, au gré du vent ou des conditions "climatiques" diverses, liées à l'impulsion, le manque de vigilance. Dans ces conditions là, la conscience est dans l'impossibilité de se poser. Elle ne peut qu'être capricieuse et virevoltante. Elle constitue ce que chacun de nous définit comme son propre "moi".
  La conscience ordinaire de l'homme est une observation interprétative compulsive de ce qui existe, et non une vision lucide de ce qui est, l'être qui voit, sans juger, sans peser, sans estimer, sans comparer...
 Le système de mes représentations (intellectuelles, psychologiques, affectives, sociales, ethniques, religieuses, scientifiques...) du monde dans lequel j'évolue, définit mon existence interne, tout comme mon existence externe, comme un ensemble de croyances, de dogmes, de savoirs, de modèles, tout en fondant la conscience que j'en ai, du moins que je peux en avoir à travers tous ces filtres personnels.
  La conscience de l'individu est donc étroitement dépendante de multiples formes de conditionnements, tout en étant prisonnière d'une sorte de coque psychique bétonnée, à l'intérieur de laquelle, elle se trouve forcément en situation de contradictions permanentes, partagée entre le devoir, le droit, la moralité, les convenances...
  Malgré cette grande confusion mentale et psychologique de la conscience duelle, l'ego, sachant toujours retomber sur ses pattes, se trouve néanmoins de multiples raisons pour justifier ses visions, nombre de stratégies de détournement pour ne pas voir ce qui le gênerait ou le placerait en situation inconfortable.
- La satisfaction des désirs-plaisirs nourrit l'activité de la conscience du moi.
- La peur, la souffrance (deux aspects liés à l'attente et au désir personnels du moi) sont éradiquées, lorsque l'être, à l'arrière-plan de l'existence, peut circuler librement. Il se produit alors une fissure, puis un éclatement de la coque de l'ego, laquelle figeait jusqu'alors le moi dans le confinement de ses prisons personnelles.
  L'a-conscience est donc une perception fulgurante et instantanée de la vie dans la totalité de son mouvement, l'un étant perçu dans la richesse de ses multiples, alors que la conscience du moi fragmente et isole l'existence, en pratiquant un effet de loupe (à la sauce égotique), selon le désir, l'humeur, la croyance, la religion, le dogme... Le moi fixe le temps et l'espace et se nourrit du passé, tout en investissant l'a-venir, alors que depuis l'Ultime-Je, qui se tient à l'arrière-plan, la vie naît et meurt à chaque instant, l'être n'attendant rien ni du passé qui est mort, ni du futur qui n'est pas là !
- Toute la réelle force de l'individualité humaine est d'incarner ici et maintenant notre côté "indivis". c'est-à-dire notre nature en essence une et indivisible, à travers une personnalité ouverte à l'inédit, à l'inconnu et non inféodé au passé et au futur.
- Il faut savoir que "le moi" ne peut connaître "le moi", car cette connaissance-là sera forcément faussée par les miroirs et les représentations erronées du moi lui-même. Un objet ne peut en effet être sujet d'observation de lui-même.
  Il faut donc envisager d'aborder et de comprendre le moi et son fonctionnement, depuis un arrière-plan, au-delà de l'interface du seul mental, bien incapable de le faire.
  Il est donc clair que l'acteur de cette observation et de cette connaissance du "moi", de ses masques et de ses multiples facettes, ne peut pas être impliqué de quelque manière que ce soit dans le processus même du moi. Il en est forcément distinct, sans en être toutefois séparé.
  Le sujet au coeur de la connaissance du moi est le Soi !
  Une première étape fondamentale dans l'impérieuse nécessité de vivre libre et sans chaînes est de pouvoir regarder, observer, voir avec objectivité et lucidité ce que je pense, ce que je dis, ce que je fais, ce que je crois...
  Cette observation fine et acérée de mes pensées, de mes émotions ou de mes actes... n'est pas aisée... une résistance vieille de trente, quarante ou cinquante ans d'habitudes de fonctionnement passif d'une pensée compulsive et stéréotypée, est puissante, et il est quasi impossible d'avancer
à contre-courant, tout au moins, les premières fois.
  C'est pour cette raison que l'on peut préconiser une attitude corporelle et émotionnelle calme, avant de pouvoir s'explorer en toute quiétude, car l'agitation, le bruit, l'activité incessante et l'absence de repos rendent improbable l'auto-observation du moi.  
  La vie du moi est assimilable à une scène de théâtre dans laquelle "le moi" revêt plusieurs rôles et personnages en s'y identifiant. À aucune moment, il ne peut se mettre à la place du spectateur qui voit et observe les agissements de ce moi. Il ne peut, non plus, être la lumière qui projette la scène dans laquelle se joue sa vie de "moi". Étant éclairé par une lumière, il n'est donc pas la lumière lui-même, et ne peut que projeter une ombre, un masque, un moment irréel, un jeu factice, qui sont souvent des leurres pour lui, sans qu'il le sache.
  Il est possible de se voir, avec lucidité, sans jugement, simplement en portant un regard sur ce "moi" en action, sans alimenter "le filage" de nos rôles dans la scène qui, de toutes manières, se déploie malgré nous.
  Commençons donc par nour arrêter, nous octroyer quelques temps de repos personnel, respirer profondément et nous installer au moins dans le silence extérieur, en attendant que le silence intérieur se produise.
  Dans cette attitude méditative de lâcher-prise, de non-action, pour une fois, nous ne pensons pas ! Rien ne se passe, sauf ce qui est créé pour le moteur du penseur qui continue à ruminer et à toussoter, délivrant une, deux, trois, dix pensées. Laissons donc le moteur tourner à "son plein régime", puisque nous ne l'alimentons plus. Laissons-le s'essouffler et mourir, puisque nous ne lui donnons plus de carburant ! Surtout, ne cherchons pas à l'arrêter. Observons son mouvement, son contenu se développer... sans y rajouter une pensée personnelle réactive. Il faut savoir que le mécanisme compulsif du mental échappe à la volonté, car il s'agit d'un "vélo automate" qui roule avec un mouvement d'inertie propre, même après que nous ayons fini de pédaler. Donc, ne pédalons plus. Laissons défiler le film, comme si nous étions ce spectateur-observateur ou ce projecteur offrant à nos
zones d'ombre une lumière nouvelle jusque-là insoupçonnable. Ce qui se nomme éclairage, intuition...
  Nous commençons alors à voir, et ce n'est plus le moi qui observe. C'est l'être que voit le "moi" en train de s'agiter, de se déployer. Pour une fois, nous sommes silencieux, sereins, souriants et compatissants vis-à-vis de ce personnage qui était nous, il y a seulement quelques minutes... Un premier processus de désentification s'est produit. La toute-autorité du moi s'est effacée quelques instants. Nous pouvons nous observer à travers un personnage joué, un peu comme si c'était un rôle théâtral que nous avons bien voulu jouer pour les besoins de l'existence...
- La nature même de l'Ultime-Je est le surgissement et cela ne prévient pas et ne peut être pré-programmé ou seulement désiré. Le Soi surgit toujours sans prévenir...
- Il faut savoir que même pour un être dit "éveillé", il se produit inévitablement un va-et-vient entre le moi et le Soi, entre la conscience duelle, qui est une forme d'acte de violence et de pouvoir sur l'existence et l'a-conscience qui est liberté absolue. Ce balancier de la conscience est différent selon les personnes, mais il est inexorablement lié à notre condition d'individu incarné, vivant dans le monde mais n'étant pas forcément de ce monde.
  Le nier serait ne pas reconnaître le fait même des deux mouvements complémentaires centrifuge et centripète de la vie elle-même.
  C'est une sorte de pont reliant le Soi au moi et qui fonde notre statut même d'être humain.
Au-delà de toute alternative
Joaquim

- Chacun aspire confusément à toucher l'essence insaisissable de ce qu'il est. Chacun sent confusément son incomplétude, et cherche à ancrer cette conscience personnelle qu'il sent limitée, dans quelque chose de plus vaste.
- Le terme d'éveil n'est pas du tout métaphorique. Il est parfaitement concret. Il faut que cette conscience, qui ne reçoit que passivement ce qui arrive, qui dort donc, s'éveille à ce qu'elle est. C'est une commotion, un retournement sur soi, qui la libère de cette coquille qu'elle prenait pour elle-même, et la fait accéder à ce qu'elle est.
- La personne a ceci de très paradoxal, qui rejoint la dualité, c'est que le désir qu'elle a d'échapper à elle-même, la lie malgré elle à son désir, autrement dit l'enferme dans ses limites personnelles. La libération ne se trouvera jamais dans le but qu'elle propose à sa quête, mais ne pourra surgir que de l'intensité même de cette quête. Lorsque cette quête devient intense au point de se satisfaire de cette intensité et d'en oublier son but, alors c'est comme si dans cette intensité se révélant à elle-même, c'est la personne qui naît de sa propre désappropriation.
- Selon que la personne s'identifie à ses propres contenus de conscience, ou bien se découvre être ce en quoi tout arrive, elle est esclave ou libre.

De la personne à l'Impersonnel
Darpan
- On ne peut pas penser son chemin vers l'être. Et pourtant, cela ne nous décourage pas de continuer à lire les textes des maîtres et d'écouter les témoignages des éveillés en nourrissant secrètement l'espoir que le déclic va enfin se produire et que cet éveil, telle une grâce, va fondre sur nous et nous libérer à jamais des tourments de notre petite personne. En toute honnêteté, êtes-vous vraiment prêt à vous détacher et mourir à tout ce qui a fait de vous l'homme que vous êtes aujourd'hui ? Nous succombons plus volontiers au marchandage, qui consiste à vouloir l'éveil tout en conservant cette personne à laquelle nous nous sommes tant attachés !
  Comme il serait facile et agréable de basculer de la personne à une dimension radieuse et impersonnelle, un peu comme l'eau coulerait d'un petit bassin vers un plus grand... Mais en réalité, ce grand bassin de l'être, ce vaste océan inconnaissable et mystérieux nous fiche une trouille terrible ! Nous pressentons qu'en nous immergeant dans ce vide impalpable et déraisonnable, nous ne pourrons jamais plus rester tels que nous sommes. Alors, face à cette "porte de Dieu", nous enlevons sans bruit nos chaussures afin de ne pas nous faire remarquer et prenons la poudre d'escampette, préférant continuer de jouer avec l'idée de l'éveil !
- Dans une démarche de connaissance de soi... l'éclairage se doit d'être cru et direct, porté jusqu'aux mécanismes les plus subtils, tapis dans l'obscurité du subconscient.
  Il n'est pas question ici de s'asseoir dans la position de lotus, d'observer sa respiration ou de chanter des mantras, mais de s'observer au quotidien, dans la rue, chez soi, au travail et dans toutes ses interactions afin de révéler ce faux "soi" comme on pèle un oignon. Cette "méditation" pratiquée au coeur même de la "place du marché", a le mérite d'apporter une certaine distance entre la présence intelligente que nous sommes et les éléments auxquels nous nous sommes identifiés. Mais pour en tirer pleinement profit, il est utile de disposer d'un portrait-robot de la personne, car ce n'est qu'en la reconnaissant qu'il devient possible de prendre de la distance et de ne plus abonder dans son sens.
- La personne que nous avons construite avec l'aide de nos parents, de nos professeurs et de notre entourage, joue un rôle d'interface entre le monde et notre vraie nature. Fruit de notre socialisation, elle est l'outil à travers lequel nous pensons, parlons, fontionnons et agissons. Primitive ou sophistiquée, elle reflète nos multiples facettes ou "personnalités". C'est également à travers elle que s'exprime notre caractère, l'empreinte unique de notre individualité.
  Notre relation avec nous-mêmes est avant tout la relation que nous entretenons avec la personne, avec ses pensées, ses émotions, son histoire personnelle, son passé et son avenir. Nous sommes littéralement captivés par l'idée que nous avons de nous-mêmes, enfermés dans la définition que nous avons construite à notre sujet. Nous nous cramponnons à la personne en recherchant constamment autour de nous le reflet de son image et de ses idées comme autant de répères rassurants. Nous sommes fascinés par le souci du regard des autres, préoccupés de savoir si nous sommes admirés, acceptés, aimés ou reconnus. Chacun de nous est pris dans sa propre représentation de lui-même, figé dans cette fausse identité qu'il imagine être lui. Notre univers gravite constamment autour de ce "je", de ses préférences et de ses aversions, de ses désirs et de ses rêves, de ses souhaits et de ses espoirs.
  La personne est cette entité en nous que veut bien changer, mais à condition que tout reste comme avant ! Elle est cette partie de nous qui refuse de lâcher prise et de s'abandonner à plus grand qu'elle, nous bloquant ainsi l'accès à la plénitude de notre vraie nature. Elle endigue une rivière sauvage et puissante entre les murs bétonnés et hermétiques de ses défenses, c'est-à-dire l'ego, nous poussant à vivre comme des refugiés dans une enclave de notre être. En nous identifiant et en nous attachant à elle, nous souffrons de vivre en tant qu'individus séparés et isolés, coupés de notre Source, affligés d'un sentiment d'incomplétude, poussés à rechercher constamment à l'extérieur ce qui nous manque à l'intérieur.
  La personne que nous croyons être est redoutablement bien armée pour survivre, habile à nous leurrer sur la nature de nos motivations et de nos quêtes. Notre capacité à percevoir et à accueillir notre vraie nature est constamment refoulée par les résistances de ce "moi" et ses habiles manoeuvres pour se maintenir au pouvoir, nous laissant entrevoir par intermittence seulement la possibilité d'être plus vastes, plus libres et plus conscients.
- Si nous n'avons pas encore pris conscience que nous sommes sous l'emprise d'une entité parasite, avide d'attention et d'énergie, cela signifie simplement que les plaisirs et l'exicitation que procure la personne n'ont pas encore été supplantés par la monstruosité de notre condition. Nous vivons dans l'ignorance de nous-mêmes. L'expérience, le vécu et la souffrance nous conduisent irrémédiablement aux limites de cette fausse identité, là où les désirs tournent à la contrainte et où l'espoir nous fait prendre conscience de la nécessité d'un changement radical. L'aspiration à nous éveiller à quelque chose de plus réel, de plus authentique survient alors, et marque le début de la vie spirituelle.
  La personne ne peut ni trouver ni devenir la vraie nature, car elle EST l'obstacle. Nous ne pouvons pas nous rapprocher de la vérité en corrigeant ou en gommant les aspects indésirables de notre personnalité, en voulant l'améliorer ou la rendre plus "spirituelle" ; il s'agit au contraire de cesser de nous y accrocher. Notre erreur est l'insistance avec laquelle nous nous attachons à cette crispation intérieure, à ce noeud vibrant que nous pensons être.
  Notre personne doit retrouver sa juste place et sa fonction première : celle d'un instrument au service de l'Être authentique.
- Notre démarche implique un travail occulte et souvent ingrat visant à accroître notre connaissance de ce que nous ne sommes pas et, par défaut, de ce que nous sommes réelllement.
  Nous sommes amenés à examiner la personne sous tous ses angles, à prendre conscience de ce qu'elle est, à l'observer au quotidien, à découvrir les lois qui la gouvernent, puis à réduire suffisamment son pouvoir en cessant de la nourrir de notre attention et en la purifiant de ses contenus douloureux et toxiques pour l'aligner sur la présence vivante de la vraie nature... Nous devons faire le sacrifice de notre personne pour réaliser ce que nous sommes réellement, éliminer consciemment et méthodiquement nos idées préconçues, et nous livrer en offrande à quelque chose d'invisible mais d'infiniment plus vaste et plus profond que l'univers de nos perceptions superficielles.
  D'où vient la personne, et comment s'est-elle construite ? En venant au monde, chacun d'entre nous hérite d'une part du malheur contenu dans la psyché collective. C'est la substance du passé, l'ignorance humaine et l'émotion douloureuse accumulées par tous ceux qui, avant nous, ont refusé d'en prendre la responsabilité... L'expérience de la naissance, les manques d'amour et de reconnaissance, l'impuissance, la douleur physique, la solitude, l'insécurité et l'insupportable sensation de séparation ont laissé en nous des marques indélébiles sur lesquelles s'est construite la personne, ou soi émotionnel.
  Cet héritage malsain est devenu le germe d'une sorte de "corps de douleur", une entité psychique agitée, le ver dans la pomme, envahissant rapidement l'espace encore vierge de l'enfant, le transformant en un être émotif et manipulateur. Tout à la fois ange et démon, il est à présent possédé psychiquement par cette substance qui grandit en lui. Exposé aux épreuves de sa propre existence, l'enfant va progressivement se fermer et s'éloigner de sa vraie nature, se retranchant dans l'espace familier de ses pensées et de ses résistances, s'attachant et s'identifiant progressivement à un personnage qui supplante la présence pure et aimante qui était la sienne.
- Toutes les frustrations et les peines que nous n'avons pas pu accueillir, éprouver, traverser consciemment et accepter pleinement se sont déposés en strates autour du noyau de douleur déjà présent dans notre psyché, engrossant la masse émotionnelle et donnant à la personne son épaisseur et sa substance.
- En prenant de l'ascendant, la personne est devenue le double de nous-mêmes, reléguant notre vraie nature au second plan, occultant ses qualités merveilleuses que nous nous mettons alors à rechercher à l'extérieur, à travers nos quêtes, nos passions, nos relations et nos accomplissements...
  Un tel tableau peut paraître exagérément sombre, surtout lorsque nous nous trouvons dans une phase heureuse ou plus facile de notre vie. Si nous ne percevons pas toute l'ampleur de cette réalité, c'est parce que nous nous sommes enfermés dans la personne, colmatant sans cesse ses failles et enfouissant ce passé énergétique dans l'oubli, derrière le système de défense sophistiqué de l'ego.
  Nous avons fait de notre mieux pour gommer de notre mémoire les éléments indésirables de notre histoire personnelle, avons travaillé d'arrache-pied pour surmonter les épreuves en plaçant dans notre subconscient tous les fragments éparpillés de nos blessures. Mais la réalité vivante de ce passé douloureux n'a pas disparu : en l'oubliant ou en l'ignorant, nous ne nous sommes pas débarrassés de nos vieux démons, nous avons simplement trouvé là une façon habile de nous préserver d'une confrontation directe avec eux, ce qui ne diminue en rien leur force et leurs répercussions dans notre vie présente.
  Prendre conscience de la possession dont nous sommes l'objet n'est possible que lorsque nous avons suffisamment clarifié et épuré notre espace intérieur. C'est à ce moment-là seulement que nous sommes en mesure de réaliser toute l'ampleur et la monstruosité de cette influence. Nous découvrons alors que notre vie s'inscrit dans une matrice de peur et de malheur, la même que celle qui dirige le monde et le soumet à son influence, répandant la violence, la guerre, l'exploitation et le manque d'amour. Lorsque nous nous en rendons compte, le choc est tel que le château de cartes que nous avons cru être nous-mêmes s'écroule, emportant dans sa chute notre idée de nous
-mêmes.
  Le plus grand deuil que nous ferons jamais est celui de notre personne. En mourant à tout ce qu'elle signifie pour nous, l'inconcevable immensité que nous peinons à reconnaître comme étant nous-même se révèle enfin comme étant notre vraie nature. Impersonnelle et pourtant si intime, elle est l'essence immaculée que nous avons cherchée dans les plus beaux souvenirs de notre enfance, dans le regard de nos proches, dans nos meilleurs moments, dans tant de lieux et de visages à travers ce jeu de cache-cache que l'on appelle la vie...
  Lorsque nous sommes touchés par la Vie elle-même, nous ne savons pas par quoi nous sommes touchés. Au plus profond de notre coeur, nous avons aspiré à cette Rencontre, mais lorsqu'elle advient, nous oscillons entre la fébrilité et l'anxiété face à ce qu'elle représente concrètement. Tel un artiste prêt à entrer en scène, nous éprouvons un trac incontrôlable, émus d'accéder à la réalité de cette impensable possibilité et tremblant à l'idée de l'incarner. Le temps vient pour nous d'accepter l'avènement de cette vibrante simplicité et de nous déployer sans cette vacuité féconde, là où le un et le multiple cessent d'exister.
De la personne individuelle à la globalité impersonnelle
Ramesh S. Balsekar
- Pour celui qui est sans désir, peut-il y avoir quelque chose à penser, à dire, ou à faire ? Ce n'est pas qu'il n'y ait pas de pensées ou que rien ne soit dit, ou ne soit fait. Toutes les pensées qui surviennent, tout ce qui est dit ou fait se produit naturellement et spontanément à travers l'organisme corps-mental qui est l'instrument de l'action. L'entité séparé qui se considère être le penseur, celui qui parle ou celui qui agit, n'existe pas... Une fois que la nature réelle du manifesté et du non-manifesté est comprise comme étant la Conscience impersonnelle, les désirs s'évaporent et il ne reste pas de motivation volontaire pour penser, dire ou faire autre chose que ce qui survient spontanément. Ces actions - et leurs conséquences, s'il en est - font partie du fonctionnement de la Totalité.
- La norme dans la vie de tous les jours, c'est la séparation. Ce qui n'est pas vu, c'est que dans une telle normalité existent conflits et misère humaine... La séparation consiste à se considérer soi-même comme une entité indépendante, séparée du reste du monde.
- L'illumination ne survient pas parce que vous avez abandonné femme, famille et richesse. Ce qui se passe, c'est que lorsque, coïncidant avec une véritable compréhension, se produit l'illumination, l'attachement à ces objets a aussi disparu. Les objets ne sont pas un obstacle, seul l'attachement aux objets fait obstacle. L'attachement aux objets des sens ne cesse qu'en présence de la conviction que toute la manifestation et son fonctionnement est un théâtre de rêve. Jusqu'à ce qu'une telle conviction s'installe, il est futile d'essayer d'abandonner quoi que ce soit. Quand une telle conviction surviendra-t-elle ? Seulement lorsque les objets des sens complètement satisfaits, il est réalisé combien une telle satisfaction est creuse et illusoire. La suppression délibérée des désirs est vaine car c'est nécessairement le moi qui décide de les abandonner.
Du personnel à l'impersonnel
Jac O'Keeffe
- "Qui vous êtes ne connaît rien de qui vous pensez être".
- L'histoire de « moi » - tout tourne autour de moi - peut devenir très douloureuse. Si vous en êtes au point où vous en avez vraiment assez de parler de « ma vie, mes croyances, mes opinions, mes possessions, mon argent, ma façon de vivre...
 », alors peut-être que la futilité de ces histoires sans fin et répétitives commence à apparaître.
- Sans toutes ces histoires auxquelles vous adhérez, vous pourriez trouver que vous n'êtes pas qui vous pensez être. Le "je" personnel ne peut jamais être satisfait, car il est fondamentalement inauthentique. Sa nature est faite de désirs. Il n'y a pas de "je" personnel qui soit constant et immuable. Il ne connaît pas la tranquillité et passe du plaisir à la souffrance en réponse directe aux sens. Le "je" personnel est une idée insatiable qui se protège constamment et recherche l'acceptation et l'amour.
  Ce cycle sans fin est sans résolution. On peut simplement le reconnaître comme un jeu futile et l'abandonner. Laissez se dissiper l'histoire de « tout à propos de moi ». À cet instant, vous réaliserez qu'il existe quelque chose qui observe le jeu de celui qui veut que tout tourne autour de lui... le "je" impersonnel ne prend pas les choses personnellement.
  Si votre point de référence est passé du "je" personnel au "je" impersonnel, les réactions émotionnelles se seront grandement atténuées, la recherche de l'amour et de l'attention sera bien effacée et le jugement d'autrui largement apaisé... De plus en plus vous remarquerez que lorsque le "je" personnel apparaît, un drame s'ensuit, car le "je" personnel cherche en permanence l'attention.
- De toute évidence, il existe moins de souffrance lorsqu'il est compris que les événements ne tournent pas autour de vous.
- Ce que vous êtes ne connaît rien du personnel ou de l'impersonnel, ne connaît rien des pratiques spirituelles, ni de l'éveil. Vous n'êtes pas qui vous pensez être et le mental ne peut concevoir ce que vous êtes réellement.
- Rien n'est à changer ou à arranger... C'est le mental qui essaye de contrôler le mental, qui essaye de minimiser la souffrance, et essaye de se détruire lui-même en imaginant que sans lui il serait plus heureux. Voyez le jeu de la vie pour ce qu'il est. Ce que vous êtes est au-delà.
Tu est toujours ce que tu es
Karl Renz
- Le type sérieux qui parle de choses sérieuses est une plaisanterie permanente et il y a un rire permanent à l'arrière-plan qui se moque de la blague qu'est Karl.
- Tu peux jouer, mais ne cherche pas à gagner ! C'est la méditation sans attente. C'est vivre sans attendre aucun résultat, car rien ne peut être ajouté à ce que tu es. Alos cela devient un pur sport ou un amusement. Et tout ce qui se présente mérite bien qu'on s'en amuse !
- En réalité, je me tiens toujours à côté de moi-même et je m'écoute. En divisant légèrement mon attention, je suis suffisamment schizophrène pour écouter ce que je dis ! Alors je deviens à la fois ce qui parle et ce qui écoute, et qui prend totalement plaisir, sans aucune séparation.
L'éveil ?
Frank Terreaux
- Dans cette recherche intérieure, il est facile de se rendre compte, que c'est dans les moments de profond désarroi, d'immense découragement, de « Je n'y arrive pas » très profond que l'on se trouve touché par la compréhension. C'est au moment où le chercheur pose enfin les armes que notre véritable nature se révèle dans son incommensurable simplicité.
  Si l'on ne pouvait même pas entrevoir ne serait-ce que le reflet de ce qui était cherché, c'est parce que le chercheur remuait l'eau en permanence.
- Quand le rappel de soi vient à vous, sans effort, vous réalisez que sa survenue ne vous a demandé aucun effort.
- Il n'y a jamais eu personne qui fasse quoi que ce soit, personne qui ne contrôle quoi que ce soit et qui plus est, personne qui se soit éveillé.